Comme beaucoup, je m’interroge : comment font les compagnies low-cost (EasyJet, RyanAir, …) pour survivre financièrement quand leur prix de billet Paris-Londres est moins cher que le taxi pour aller à l’aéroport ?

L’écart de tarif pour les courts ou moyens courriers entre les low-cost et les compagnies traditionnelles est souvent incroyable. Il n’y a donc que deux possibilités :

  • – soit le modèle low cost dans l’aviation est une bulle qui va éclater à terme;
  • – soit les compagnies traditionnelles nous arnaquent et les prix des billets sont grossièrement surestimés …

 A moins, à moins … que le modèle low cost ne soit en fait un modèle d’exploitation alternatif et viable qui joue avec les grands équilibres financiers ?!

 Comment y voir plus clair ? C’est simple : utilisons la Théorie des Contraintes (TOC) !

 Pour commencer, étudions les données d’entrée, en prenant par exemple la liaison Lyon-Nantes où HOP/Air France et EasyJet sont en concurrence.

Critères de comparaison HOP EASYJET
Fréquence / Remplissage 4 A/R par jour

Avions parfois peu remplis et de manière aléatoire

 

4 A/R par jour

Avions très remplis (je suis témoin !)

Service à bord Un café et un gâteau sec servi gratuitement (merci !)

 

Service payant (pas très cher)

 

Bagages 1 bagage cabine autorisé + 1 deuxième en format réduit (en théorie !)

 

Contrainte bagage forte (un seul bagage cabine)

 

Embarquement Contrainte de timing d’embarquement normale

 

Contrainte de timing d’embarquement forte

 

Tarif sur la semaine du 19/02/18 avec retour le lendemain

 

Min : 151 €

Max : 700 € (WE)

 

Min : 53 €

Max : 220 € (WE)

 

Chiffre d’affaire Dépend du taux de remplissage. Optimisé au maximum

En appliquant les 5 étapes de la TOC, que comprenons nous ?

1/ Identifions la contrainte

Il y a plusieurs contraintes qui limitent la capacité à générer plus de richesse (Chiffre d’affaire – frais 100% variables) : l’avion ? le prix ? les horaires ? Pour choisir, identifions quelle est la contrainte la plus fixe et la plus difficile à bouger : clairement c’est l’avion, non ?

2/ Optimisons la contrainte

Pour optimiser la contrainte (l’avion), il faut s’assurer de

  • Sa disponibilité
  • Son utilisation optimale
  • Son remplissage optimal

Il va donc falloir du matériel moderne et bien entretenu (taux de panne, consommation, diagnostic à distance, …) !

L’âge moyen de la flotte est de 6 à 7 ans pour Easyjet et de 12,4 ans pour HOP !

https://www.airfleets.fr/ageflotte/fleet-age.htm

Mon expérience n’est pas valable statistiquement mais je n’ai jamais eu de gros retard ni d’annulation avec Easyjet alors que j’en ai connu plusieurs avec HOP.

3/ Subordonnons les autres processus à notre contrainte

Il faut maintenant voir comment augmenter la capacité de l’avion à générer plus de valeur :

  • Il faut plus le remplir
  • Il faut le faire voler plus longtemps (plus de rotations)

Pour cela, Easyjet propose ses solutions :

  • Temps d’embarquements réduits au maximum
  • Aucune empathie pour les retardataires, n’arrivez pas en retard ! L’avion ne vous attendra pas (votre place est payée ?), la ponctualité est une clef de réussite pour des rotations plus nombreuses (diminution des temps d’attente entre chaque vol)
  • Des prix très attractifs (dans le cas des vols aériens, le prix influence directement l’achat de nombreuses personnes)

Les avions sont tellement pleins chez Easyjet (93% en MOYENNE sur 2017) https://www.capital.fr/entreprises-marches/easyjet-a-transporte-81-6-millions-de-passagers-en-2017-un-record-1263778 que cette compagnie rencontre un problème que HOP n’a pas … il n’y a pas assez de place pour les bagages ! Et oui, nos avions ne sont pas faits pour accueillir un bagage par personne ou plus exactement … ne sont pas étudiés pour être pleins !

Voilà pourquoi Easyjet met une contrainte aussi forte sur les bagages cabines. Ils subordonnent les autres processus à leur contrainte quitte à « reporter » sur les passagers une réduction de confort.

 

4/ Nous n’aurons pas besoin pour notre exercice d’envisager d’élever la contrainte (mettre un avion ayant plus de capacités, voire ajouter une rotation)

5/ Enfin, il faut bien entendu veiller à ce que la contrainte ne se soit pas déplacée !

 

Nous pourrions imaginer une insatisfaction client trop forte des conditions d’embarquement ou de la limitation des bagages.

Voilà comment dans un business qui était très codifié il y a quelques années, les compagnies low cost ont (vont ?) remis en question le modèle afin de mieux tirer parti de leurs contraintes majeures : leurs avions.

La réussite de tels modèles peut nous inciter dans d’autres types d’environnement à prendre le temps de regarder nos contraintes et de se poser la question : est-ce que j’en tire bien le maximum de valeur ?

La bonne nouvelle c’est que nous savons faire cela et que nous pouvons vous aider à le faire !

A bientôt !