En clair, même si le nom et le concept peuvent sembler opaques, on a là un vrai levier de changement, qui peut faire avancer le Développement Durable et la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), et est de plus en plus utilisé …

Levons tout d’abord le voile sur la notion de Matérialité …

Vu que cela concerne la RSE, commençons par nous mettre d’accord quant à sa définition. Il en existe beaucoup, je vous en propose une très simple : développer une entreprise tout en minimisant les impacts négatifs de ses activités sur l’environnement et en maximisant les impacts positifs pour la société.

Derrière la Matérialité, on trouve ainsi l’idée que pour (bien) faire de la RSE, il faut d’abord (bien) connaitre ces fameux impacts.

Et contrairement à ce qu’ont pensé les entreprises pendant des décennies, ceci est un exercice qu’on ne peut pas faire seuls en vase clos. En effet, dès lors que ces impacts concernent les parties prenantes externes, les définir en interne revient à émettre des suppositions, sans vraies certitudes. Avec les risques d’erreurs qu’on peut imaginer …

Une démarche de Matérialité consiste donc à demander aux parties prenantes externes de nous aider à préciser les impacts (positifs et négatifs) de nos activités. Et par préciser, on veut dire apporter des faits, des éléments tangibles, bref de la Matière !

Un levier de changement, vraiment ?

Pour pouvoir répondre à cette question essentielle, examinons tout d’abord le déroulement d’une démarche de Matérialité :

  1. cartographier et sélectionner les parties prenantes internes et externes ;
  2. identifier la liste de des principaux enjeux sociaux, environnementaux et économiques en lien avec vos activités . Il existe de nombreux référentiels pour ce faire (ISO 26000, ODD des Nations Unies, BNQ21000, etc.) et un accompagnement expert peut souvent simplifier cette étape ;
  3. le cœur de la Matérialité : caractériser et l’évaluer les impacts découlant des enjeux de l’entreprise ; cette évaluation se fait séparément et avec des critères distincts selon qu’on soit partie prenante interne ou externe ;
  4. formaliser la matrice de Matérialité, où en croisant les évaluations externes et internes, on obtiendra le niveau d’importance de chacun des enjeux au regard de leurs impacts.

Avec une telle démarche, tout d’un coup, on ouvre les portes de son entreprise ; on partage des informations autrefois un peu confidentielles ; et surtout, on accepte l’idée que des gens externes à l’entreprise puisse influencer nos priorités.

Autant vous dire que pour bon nombre de dirigeants, s’engager dans la Matérialité requiert un changement significatif, quasiment culturel …

Et quelles sont les clefs pour réussir une démarche de Matérialité ?

Elles résident d’abord dans une volonté des dirigeants de s’engager dans une telle démarche. Ce qui veut dire avoir bien conscience des énormes bénéfices qui peuvent en découler en termes d’acceptation sociétale, de mobilisation interne, de mitigation des risques, tout en ayant accepté les conditions de réussite à respecter.

Elles dépendent également de l’approche choisie et de la transparence avant, pendant et après les travaux. Une vraie rigueur méthodologique (ex : choix de critères d’évaluation factuels) est requise et la diffusion « at large » de la démarche est indispensable.

Elles reposent enfin sur l’utilisation qui sera faite des résultats. Si vous faites seulement « de la Com » au sujet de votre démarche de Matérialité le retour de bâton sera féroce : greenwashing, hypocrisie, manipulation, etc. Vous aurez atteint exactement l’inverse de ce que vous espériez …

En revanche, si vous faites évoluer votre stratégie et vos plans d’actions à la lueur des résultats ; si vous profitez de la démarche pour mettre en œuvre des projets communs avec vos parties prenantes ; si vous renouvelez régulièrement l’exercice, alors comme l’a dit Rudyard, vous serez en RSE les amis !