La force du langage

 Nous, êtres humains, sommes dotés d’un langage très sophistiqué qui nous permet, normalement, de communiquer aisément. Au fil des siècles, le langage a contribué à notre évolution culturelle. Aujourd’hui, dans presque toute société, il est devenu notre principale force (soyons optimistes).

Nous savons nous organiser sans faire appel à nos muscles (optimisme durable). En entreprise, la force s’un leader se mesure davantage à son éloquence, son charisme, son énergie qu’à sa capacité à soulever des altères.

Nous pourrions penser que la parole se suffit à elle-même pour manager. Il n’en est rien, nombreux sont les managers à la recherche d’outils.

Qu’entendons-nous par outils ?

 Marteau, tournevis, pelles et pioches, nous sont indispensables pour réaliser certaines tâches. Impossible de dévisser une vis sans tournevis, de planter un clou à main nu.

En management nous avons des modèles, des matrices, des grilles et des tableaux. Est-ce que la métaphore forge des croyances sur l’incapacité à manager une équipe sans un « kit de survie » ?

Les mauvais ouvriers ont de mauvais outils, paraît-il ? Managers, pressez-vous d’être bien outillés, pour ne point paraître inconséquents, voire incompétents.

C’est de cela qu’il s’agit, paraître, car manager c’est s’exposer.  D’où l’importance de présenter les plus belles parures et les bons attributs (verts de préférence).

La première fonction des outils serait de rassurer son utilisateur, la seconde de faire bonne figure. Mais alors, rien à voir avec le management puisque au fond, les outils ne sont utiles qu’au manager lui-même.

Qu’est-ce que manager ?

La référence étymologique est faite au manège, l’endroit où se dresse les chevaux. Aujourd’hui ce sont les hommes, qu’il s’agit moins de dresser que de conduire. De toute évidence, c’est bien les relations entre personnes que nous évoquons quand nous parlons de management.

En quoi des modèles et des tableaux peuvent-ils nous être utiles pour entrer en relation avec d’autres gens ?

En rien, évidemment, et pourtant ils le sont, comme l’est le Youpala pour un bébé. Ils stimulent mais ne sont pas sans danger. Au début et à titre provisoire, il développe l’assurance et la confiance du manager. A trop être présent, ils coupent la relation et provoquent la mise à distance, l’inverse de ce qui favorise la relation.

C’est ainsi que certains managers délèguent leurs décisions à leur tableur préféré. Si Excel le dit alors c’est vrai ! Si l’indicateur est vert, alors c’est bon. Nous parlons d’une dérive du management outillé qui parfois conduit les managers… devant la justice.

Les modèles et les tableaux ont peu d’empathie.

Quel est le meilleur outil de management ?

« L’homme est un loup pour l’homme »[1] mais l’homme est aussi un outil pour l’homme. En d’autres termes, managers, empressez-vous d’apprendre de nombreux outils pour pouvoir les oublier.

Le meilleur outil du manager, c’est lui-même. Dans le détail, sa tête, son intelligence, son intuition. Son cœur, son écoute, son accueil. Ses bras et ses jambes, sa proximité, ses rencontres, ses promenades rituelles, d’un atelier à l’autre, d’un bureau à l’autre.

Mieux vaut avoir les outils dans la tête que la tête dans les outils.

[1] Thomas Hobbes

Stan MADORE